sombres songes subversifs et submergés
Publié : 22 févr. 2008, 11:58
sombres songes subversifs et submergés
Je rêve peu mais cauchemarde beaucoup. Surtout depuis quelques temps. Jamais la même histoire. Aucun rêve identique. Ou d'impression de déjà vu. Pourtant, un élément récurrent revient toujours. Mais sous différentes formes. Au gré de mes aventures nocturnes.
Cette sensation, c'est celle de l'impuissance. Non pas physique, mais l'impression de perdre tous mes moyens, quels qu'il soient. Cette incapacité d'action me mène vers une sorte de fatalité immuable : la mort, et volontiers par noyade.
Mort douce. Sentiment d'étouffer. Illusion d'être submergé (sans doute dans un océan d'émotion). Voilà mon quotidien nocturne.
Dernier exemple en date. Pas plus tard que cette nuit. Je rêve d'une fin du monde apocalyptique dans la plus pure tradition hollywoodienne du film catastrophe. Une pluie de magma en fusion s'abat sur terre. Aucune région du monde n'est épargnée. Mais je ne me préoccupe que de ma petite existence. Tirer mon épingle du jeu. J'y parvient tant bien que mal. J'esquive les gouttes de cette averse incandescente. Je franchis les torrents de la lave, qui ont maintenant remplacé le flux de la circulation dans les rues de ma ville. Les cadavres carbonisés jonchent le sol. Certaines personnes se donnent la mort pour ne pas périr brûlé. Tout flambe autour de moi. Des secouristes s'affairent. Au détour d'une conversation surréaliste, j'entends dire qu'un pont aérien a été dressé entre ma ville et la capitale, apparemment épargnée par les incidents. Je me rends à l'aéroport pour fuir au plus vite. Une foule de rescapés tente de faire pareil. Le hall de l'aérogare est noir de monde. Tous se battent pour obtenir un billet vers la vie. Je suis l'un d'eux. En jouant des coudes, j'arrive à me hisser sur la passerelle. Je prends place à bord du jumbo jet affrété pour l'occasion. L'intérieur est immense, plus d'une trentaine de mètres de large, avec autant de siège passagers pour le combler. Les cris stridents des gosses résonnent dans l'appareil. Le commandant de bord nous livre son speak traditionnel (temps de vol, condition météo...), les hôtesses égrainent les consignes de sécurité. Enfin, les réacteurs font retentir leur bruit assourdissant. C'est la délivrance, la salvation. Le jumbo s'engage sur la piste, encombrée par d'autres vols au départ. En file indienne, les avions décollent tour à tour. Au moment de mettre les gaz, un petit avion de tourisme s'engage sur la piste à partir du taxiway voisin. Il coupe la route au jumbo et impose au gros porteur de ralentir. Mon pilote ne sait plus s'il a suffisamment de vitesse pour décoller. Il maintient l'allure en sachant pertinemment qu'il n'aura pas assez d'élan pour se détacher du sol. Dans un élan de lucidité, il inverse les réacteurs et amorce le freinage d'urgence. Il est trop tard. La piste n'est pas assez longue. Ce n'est pas un champs ou une prairie qu'on entrevoit au loin. Non, c'est la mer. Le bout du polder. Je suis à Nice. Et je m'apprête à plonger dans la baie des anges. La scène se déroule au ralenti. L'avion glisse doucement dans la mer.
L'eau s'engouffre lentement dans l'appareil. J'admire un poisson au couleurs vives par le biais du hublot. Le niveau de l'eau monte. Je ne lutte pas. Je sais que la fin est proche. D'autre essaient d'en réchapper. Moi non. Je meure paisiblement. Je me réveille.
Pourquoi après avoir bravé tous les dangers une fin si improbable et digne d'une mauvaise série B ? Toujours cette fatalité qui me rappelle à l'ordre. Quelques soient mes efforts pour m'en extraire, l'issue de mes rêves est toujours inéluctable.
D'autre fois, je rêve d'un champ de bataille. Genre grande guerre. Avec son lot de tranchées, de barbelés, de cadavres aux membres éparpillés. Lieu commun de toute guerre finalement...
Je suis un soldat. Je ne sais pas pour qui je me bats. Pour quelles raisons. Sous quel drapeau. Je suis simplement là , peut-être pas hasard. Un fusil à la main, la cartouchière en bandoulière. Il ne me reste plus qu'une grenade, que je lance avec conviction chez les salauds d'en face. Elle n'explose pas. Je me réfugie à l'abri d'un cratère d'obus encore fumant. J'observe la scène. Je cherche des yeux ma compagnie, mais ils ont tous battu en retraite. Je reste seul au milieu de ce no man's land. J'ai toujours été un bon tireur. Même de loin, je réussirais sans doute à semer la pagaille dans les rangs adverses. Le casque de l'un de mes ennemis dépasse de sa tranchée. Je mets mon arme en joue et cale ma future victime dans mon viseur. Je retiens ma respiration pour plus de précision. Je tire, sans bouger d'un iota. La balle n'a visiblement pas atteint son but puisque ma proie est maintenant en mouvement. Je réitère mon geste. Rien à faire. Les balles sifflent mais ne touchent jamais. Elles n'effleurent même pas. J'épuise comme ça une bonne partie des cartouches de mon chargeur. L'homme auquel je viens d'adresser une salve de balles vient vers moi. Il est encore loin mais je parviens à distinguer les traits de son visage. Bientôt, ce sera lui ou moi. Je tire à nouveau, à plusieurs reprise. Mais rien n'y fait. Tous mes projectiles sont comme déviés de leur trajectoire. Impossible d'atteindre ma cible. Le soldat se rapproche dangereusement. Il n'est plus qu'a quelques mètres. Je tire mon ultime cartouche, qui n'échappe pas à la règle. Je lève les yeux. L'ennemi est juste au dessus de moi.
Il m'embroche avec sa baïonnette. Je m'écrase au fond du cratère d'obus, gisant dans la boue.
Dans de nombreux autres rêves, je rêve. C'est-à -dire normalement. Des rêves délirants et plaisants. Mais la chute est souvent la même. Où que je sois, je finis dans une maison en bord de mer. Une vague gigantesque submerge alors la côte. Le ras de marée détruit tout sur son passage, y compris la maison dans laquelle j'ai la malchance de me trouver.
Récemment, c'est un scénario lynchéen qui s'est joué dans ma nuit. Un théâtre à l'italienne. Des longs couloirs qui mènent à la salle. Des corniches et pastiches rococo à perte de vue. De longs rideaux rouges et pourpres. Des statues d'apollon en plâtre d'un blanc immaculé.
Il n'y pas de représentation à l'honneur ce soir là . Il n'y a personne hormis mes amis et moi. Nous sommes ainsi une petite dizaine à errer dans les longues travées du théâtre. Ce sont mes amis mais je ne les reconnais pas. Tous ont changé de personnalité, pour s'approprier celle d'un autre. Ils deviennent du coup méconnaissables. Conscient du problème, je tente de leur expliquer pour remettre les choses en ordre. J'ouvre la bouche, mais aucun son ne parvient à sortir. Je n'arrive pas à exprimer, non pas mes pensées, qui elles existent bel et bien, mais à m'exprimer tout court. Emettre le moindre son m'est impossible. J'essaie et je réessaie, mais toujours rien. Chose étrange, c'est à ce moment là , toujours endormi et empêtré dans mon histoire que j'ai le réflexe de me dire qu'il faut écrire tout ça. Non pas pour me rendre audible auprès de mes amis dans mon rêve. Seulement pour garder une trace manuscrite de ce rêve absurde. C'est comme si j'avais eu conscience de la bizarrerie de la chose dans mon rêve. Et que mon esprit a tout à coup repris le dessus pour me ramener dans la réalité. Je me suis réveillé à ce moment là . Je n'ai bien sûr pas pris la peine de rédiger quoi que ce soit et me suis assoupis illico. C'est difficile de relater dans le détail ce rêve insolite qui m'a marqué durablement.
Parfois, à l'article de la mort, j'empoigne mon téléphone pour appeler de l'aide. Impossible d'émettre le moindre son et de me faire entendre. Même composer le numéro relève de l'exploit. D'autre fois, c'est par strangulation que je succombe dans mon lit.
Je rêve peu mais cauchemarde beaucoup. Surtout depuis quelques temps. Jamais la même histoire. Aucun rêve identique. Ou d'impression de déjà vu. Pourtant, un élément récurrent revient toujours. Mais sous différentes formes. Au gré de mes aventures nocturnes.
Cette sensation, c'est celle de l'impuissance. Non pas physique, mais l'impression de perdre tous mes moyens, quels qu'il soient. Cette incapacité d'action me mène vers une sorte de fatalité immuable : la mort, et volontiers par noyade.
Mort douce. Sentiment d'étouffer. Illusion d'être submergé (sans doute dans un océan d'émotion). Voilà mon quotidien nocturne.
Dernier exemple en date. Pas plus tard que cette nuit. Je rêve d'une fin du monde apocalyptique dans la plus pure tradition hollywoodienne du film catastrophe. Une pluie de magma en fusion s'abat sur terre. Aucune région du monde n'est épargnée. Mais je ne me préoccupe que de ma petite existence. Tirer mon épingle du jeu. J'y parvient tant bien que mal. J'esquive les gouttes de cette averse incandescente. Je franchis les torrents de la lave, qui ont maintenant remplacé le flux de la circulation dans les rues de ma ville. Les cadavres carbonisés jonchent le sol. Certaines personnes se donnent la mort pour ne pas périr brûlé. Tout flambe autour de moi. Des secouristes s'affairent. Au détour d'une conversation surréaliste, j'entends dire qu'un pont aérien a été dressé entre ma ville et la capitale, apparemment épargnée par les incidents. Je me rends à l'aéroport pour fuir au plus vite. Une foule de rescapés tente de faire pareil. Le hall de l'aérogare est noir de monde. Tous se battent pour obtenir un billet vers la vie. Je suis l'un d'eux. En jouant des coudes, j'arrive à me hisser sur la passerelle. Je prends place à bord du jumbo jet affrété pour l'occasion. L'intérieur est immense, plus d'une trentaine de mètres de large, avec autant de siège passagers pour le combler. Les cris stridents des gosses résonnent dans l'appareil. Le commandant de bord nous livre son speak traditionnel (temps de vol, condition météo...), les hôtesses égrainent les consignes de sécurité. Enfin, les réacteurs font retentir leur bruit assourdissant. C'est la délivrance, la salvation. Le jumbo s'engage sur la piste, encombrée par d'autres vols au départ. En file indienne, les avions décollent tour à tour. Au moment de mettre les gaz, un petit avion de tourisme s'engage sur la piste à partir du taxiway voisin. Il coupe la route au jumbo et impose au gros porteur de ralentir. Mon pilote ne sait plus s'il a suffisamment de vitesse pour décoller. Il maintient l'allure en sachant pertinemment qu'il n'aura pas assez d'élan pour se détacher du sol. Dans un élan de lucidité, il inverse les réacteurs et amorce le freinage d'urgence. Il est trop tard. La piste n'est pas assez longue. Ce n'est pas un champs ou une prairie qu'on entrevoit au loin. Non, c'est la mer. Le bout du polder. Je suis à Nice. Et je m'apprête à plonger dans la baie des anges. La scène se déroule au ralenti. L'avion glisse doucement dans la mer.
L'eau s'engouffre lentement dans l'appareil. J'admire un poisson au couleurs vives par le biais du hublot. Le niveau de l'eau monte. Je ne lutte pas. Je sais que la fin est proche. D'autre essaient d'en réchapper. Moi non. Je meure paisiblement. Je me réveille.
Pourquoi après avoir bravé tous les dangers une fin si improbable et digne d'une mauvaise série B ? Toujours cette fatalité qui me rappelle à l'ordre. Quelques soient mes efforts pour m'en extraire, l'issue de mes rêves est toujours inéluctable.
D'autre fois, je rêve d'un champ de bataille. Genre grande guerre. Avec son lot de tranchées, de barbelés, de cadavres aux membres éparpillés. Lieu commun de toute guerre finalement...
Je suis un soldat. Je ne sais pas pour qui je me bats. Pour quelles raisons. Sous quel drapeau. Je suis simplement là , peut-être pas hasard. Un fusil à la main, la cartouchière en bandoulière. Il ne me reste plus qu'une grenade, que je lance avec conviction chez les salauds d'en face. Elle n'explose pas. Je me réfugie à l'abri d'un cratère d'obus encore fumant. J'observe la scène. Je cherche des yeux ma compagnie, mais ils ont tous battu en retraite. Je reste seul au milieu de ce no man's land. J'ai toujours été un bon tireur. Même de loin, je réussirais sans doute à semer la pagaille dans les rangs adverses. Le casque de l'un de mes ennemis dépasse de sa tranchée. Je mets mon arme en joue et cale ma future victime dans mon viseur. Je retiens ma respiration pour plus de précision. Je tire, sans bouger d'un iota. La balle n'a visiblement pas atteint son but puisque ma proie est maintenant en mouvement. Je réitère mon geste. Rien à faire. Les balles sifflent mais ne touchent jamais. Elles n'effleurent même pas. J'épuise comme ça une bonne partie des cartouches de mon chargeur. L'homme auquel je viens d'adresser une salve de balles vient vers moi. Il est encore loin mais je parviens à distinguer les traits de son visage. Bientôt, ce sera lui ou moi. Je tire à nouveau, à plusieurs reprise. Mais rien n'y fait. Tous mes projectiles sont comme déviés de leur trajectoire. Impossible d'atteindre ma cible. Le soldat se rapproche dangereusement. Il n'est plus qu'a quelques mètres. Je tire mon ultime cartouche, qui n'échappe pas à la règle. Je lève les yeux. L'ennemi est juste au dessus de moi.
Il m'embroche avec sa baïonnette. Je m'écrase au fond du cratère d'obus, gisant dans la boue.
Dans de nombreux autres rêves, je rêve. C'est-à -dire normalement. Des rêves délirants et plaisants. Mais la chute est souvent la même. Où que je sois, je finis dans une maison en bord de mer. Une vague gigantesque submerge alors la côte. Le ras de marée détruit tout sur son passage, y compris la maison dans laquelle j'ai la malchance de me trouver.
Récemment, c'est un scénario lynchéen qui s'est joué dans ma nuit. Un théâtre à l'italienne. Des longs couloirs qui mènent à la salle. Des corniches et pastiches rococo à perte de vue. De longs rideaux rouges et pourpres. Des statues d'apollon en plâtre d'un blanc immaculé.
Il n'y pas de représentation à l'honneur ce soir là . Il n'y a personne hormis mes amis et moi. Nous sommes ainsi une petite dizaine à errer dans les longues travées du théâtre. Ce sont mes amis mais je ne les reconnais pas. Tous ont changé de personnalité, pour s'approprier celle d'un autre. Ils deviennent du coup méconnaissables. Conscient du problème, je tente de leur expliquer pour remettre les choses en ordre. J'ouvre la bouche, mais aucun son ne parvient à sortir. Je n'arrive pas à exprimer, non pas mes pensées, qui elles existent bel et bien, mais à m'exprimer tout court. Emettre le moindre son m'est impossible. J'essaie et je réessaie, mais toujours rien. Chose étrange, c'est à ce moment là , toujours endormi et empêtré dans mon histoire que j'ai le réflexe de me dire qu'il faut écrire tout ça. Non pas pour me rendre audible auprès de mes amis dans mon rêve. Seulement pour garder une trace manuscrite de ce rêve absurde. C'est comme si j'avais eu conscience de la bizarrerie de la chose dans mon rêve. Et que mon esprit a tout à coup repris le dessus pour me ramener dans la réalité. Je me suis réveillé à ce moment là . Je n'ai bien sûr pas pris la peine de rédiger quoi que ce soit et me suis assoupis illico. C'est difficile de relater dans le détail ce rêve insolite qui m'a marqué durablement.
Parfois, à l'article de la mort, j'empoigne mon téléphone pour appeler de l'aide. Impossible d'émettre le moindre son et de me faire entendre. Même composer le numéro relève de l'exploit. D'autre fois, c'est par strangulation que je succombe dans mon lit.